Mon discours à la Tribune de l’Assemblée nationale en tant que rapporteure du Projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte

Je vous invite à retrouver le discours que j’ai prononcé le 1er octobre à la tribune de l’Assemblée nationale, en tant que rapporteure du Projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte :

 

Projet de loi relatif à la transition énergétique et à la croissance verte

Sabine Buis, députée rapporteure

 

Monsieur le président,

Madame la ministre,

Monsieur le président de la commission spéciale,

Mesdames et messieurs les rapporteurs,

Chers collègues.

 

Le projet de loi dont l’Assemblée nationale est aujourd’hui saisie, deviendra, j’en suis convaincue, « l’une des lois les plus importantes du quinquennat ».

Pour une raison principale.

Cette loi témoigne d’un basculement culturel profond. Un basculement culturel sur deux enjeux essentiels pour l’avenir de la France et pour l’avenir de l’humanité : l’énergie et la lutte contre le changement climatique.

Ce basculement se fait sur une idée simple qui est aussi le fil rouge de cette loi : ce n’est plus le gaspillage qui fera notre richesse mais la lutte contre le gaspillage.

Au-delà des objectifs, au-delà des articles, ce projet de loi doit nous amener, toutes et tous, à changer notre conception, non seulement de la croissance économique, mais aussi de notre modèle économique tout entier.

Par cette loi, le Parlement va clairement indiquer au pays que son avenir dépend d’une croissance verte, respectueuse des hommes et de notre environnement.

Par cette loi, le Parlement va indiquer que le cap est celui d’une économie circulaire.

C’est pourquoi, je suis heureuse et fière d’être rapporteure d’un texte qui démontre que l’écologie n’est pas l’ennemie de l’économie mais la condition de notre développement.

Qui démontre aussi que notre but est, non seulement de répondre maintenant à la crise économique et sociale qui frappe notre pays, mais aussi de préparer l’entrée de la France dans le monde de l’après pétrole alors que, précisément, le monde entier bascule dans cette nouvelle étape de l’Histoire.

Je suis fière et heureuse d’être rapporteure d’un texte qui propose un projet de société motivant et enthousiasmant à une époque où les marchands de peurs, de sinistroses et d’idées mortifères prospèrent. Alors que notre pays doute de lui-même et est tenté par le repli sur soi, cette loi lui offre une perspective, lui propose un avenir fondé sur des valeurs nouvelles qui sont autant de facteurs de croissance économique : l’usage, la coopération, le partage, la solidarité, les pratiques collaboratives.

Le meilleur moyen de répondre au bruit de bottes qui se fait entendre chaque jour plus fortement,

ü  c’est de proposer un projet de vivre ensemble autour duquel nous puissions tous nous retrouver.

ü  c’est de proposer aux françaises et aux français un nouveau contrat social et écologique sur lequel nous retrouver

Et c’est pourquoi, eu égard à cet enjeu, je souhaite de toutes mes forces, chers collègues, que nous dépassions nos clivages et les intérêts partisans pour ne songer qu’à l’intérêt général, pour construire cette loi ensemble.

Nous l’avons fait hier, au lendemain du Grenelle de l’environnement lors du vote de la loi du 3 août 2009. Nous pouvons le refaire aujourd’hui.

A ce sujet, je tiens ici à remercier le Président Brottes grâce à qui nous avons eu des débats riches et constructifs en Commission, loin des postures habituelles que les français ne supportent plus.

J’espère que c’est avec le même esprit de responsabilité et d’apaisement que nous poursuivrons ensemble nos travaux en séance.

Pour ma part, j’ai étudié le projet du Gouvernement et proposé des amendements avec un souci constant, qui est aussi celui de la ministre, Ségolène Royal : éviter le bavardage, éviter de multiplier les normes.

Notre but est d’encadrer pas d’étouffer la société sous le poids des belles idées à petits effets.

Notre but n’est pas de multiplier les contraintes mais plutôt faire confiance aux acteurs locaux.

Elue d’un territoire rural – l’Ardèche – souvent oublié par les politiques publiques – je sais très bien qu’une mesure ne s’applique pas toujours de la même manière à Paris qu’à Aubenas.

Un mot sur les titres dont vous avez bien voulu me confier le rapport.

Je remercie tout d’abord le Gouvernement d’avoir érigé le bâtiment en priorité.

Pour répondre à la crise très grave que traverse ce secteur, chaque mesure que nous voterons doit permettre d’assurer à chacun le droit à un logement décent, qui suppose : d’abord que des logements soient construits mais aussi qu’ils soient bien construits.

En 2014, il n’est plus acceptable que des enfants aient froid parce que leurs parents ne peuvent plus payer la facture de chauffage.

La lutte contre la précarité énergétique exige donc la reconnaissance de ce droit à un logement décent.

Qui est un droit pour les locataires mais aussi pour les propriétaires.

La création d’un carnet de santé numérique du logement, la création d’un fond de garantie pour la rénovation énergétique du logement, le développement du tiers financement, le développement des groupements d’artisans, l’émergence d’un service public de la performance énergétique coordonné par les régions, sont autant de mesures qui vont permettre à tous, propriétaires ou locataires, d’avoir accès aux travaux de rénovation énergétique, d’améliorer la sécurité et le confort de nos maisons, de créer des emplois durables et non délocalisables.

Ici aussi, nous allons prouver que la protection de l’environnement et de la santé ne sont pas contraires à la croissance économique mais – au contraire – sont la condition pour remplir les carnets de commande de nos entreprises du bâtiment.

Pour les accompagner, pour les encourager, il nous faut un Plan Marshall de la construction.

C’est ce que propose le projet de loi adopté en Commission. Je défendrai donc la création d’une stratégie nationale à l’horizon 2050 pour mobiliser les investissements en faveur de la maîtrise de l’énergie, dans le parc national de bâtiments publics et privés, à usage résidentiel et tertiaire.

Un mot également sur le Titre IV qui est relatif à l’économie circulaire et aux déchets.

Je vous remercie d’avoir adopté, en commission, un amendement qui permet, non seulement de donner une définition opérationnelle à l’économie circulaire mais aussi de la faire entrer dans le code de l’environnement.

Ni décroissance ni productivisme : l’économie circulaire est d’abord une éthique de la responsabilité : celle de consommer autrement nos ressources pour créer une nouvelle prospérité.

Demain, la promotion de l’économie circulaire sera l’un des leviers pour atteindre l’objectif mondial du développement durable. Permettez-moi ici de saluer le travail que réalise notre collègue François-Michel Lambert depuis plusieurs années, pour nous imposer de changer de lunettes lorsque l’on regarde notre économie.

Mais s’en tenir à une définition, aussi belle soit-elle, ne sert à rien si elle n’est pas accompagnée de mesures concrètes pour la mettre en œuvre.

C’est pourquoi, il est utile de faire entrer l’économie circulaire dans le code des marchés publics en demandant aux grands pouvoirs adjudicateurs de réfléchir différemment à la manière dont ils conçoivent leurs achats. La commande publique est un levier puissant de développement de l’économie circulaire.

Le titre IV a également le mérite de définir précisément et clairement les objectifs de la France en matière de prévention et de gestion des déchets.

Avec une idée simple : le bon déchet est celui que l’on ne produit pas

Avec pragmatisme : il y aura encore demain des déchets et ils doivent être traités dans le respect de notre environnement et dans l’intérêt de notre économie.

La réduction de la production de déchets, le développement du tri à la source des déchets organiques, la progression vers une tarification incitative, le développement des filières de collecte, de réemploi et de recyclage sont autant de mesures concrètes qui doivent aider nos élus locaux et nos entreprises à faire d’un problème, une opportunité.

Le fil rouge de cette loi est toujours le même : ce n’est plus le gaspillage qui fera notre richesse mais la lutte contre le gaspillage.

Qu’il s’agisse de lutter contre le gaspillage alimentaire, contre le gaspillage d’énergie, contre l’éclairage inutile, contre l’obsolescence programmée des produits de consommation l’idée est toujours la même : rendre du pouvoir d’achat aux français en respectant notre environnement.

Cette loi doit être une arme à l’écolo-scepticisme qui prospère depuis le sommet de Copenhague de 2009.

Cette loi doit démontrer la volonté de la France de réussir le sommet de Paris qui se tiendra en décembre 2015.

Mes chers collègues, je me réjouis par avance de l’œuvre utile que nous allons bâtir ensemble dans les jours à venir.

Et j’espère que nos enfants pourront nous dire merci.

Tribune AN