Gaz de schiste : le travail continue

Dans le cadre du groupe de travail sur la réforme du code minier, j’ai reçu ce mercredi 14 mai à l’Assemblée nationale une délégation argentine affectée par l’exploitation de gaz de schiste, accompagnée de Juliette Renaud, représentante des Amis de la Terre France. Cette rencontre a été l’occasion de croiser les expériences, et de constater les dommages écologiques et sociaux occasionnés par l’exploitation des hydrocarbures non-conventionnels dans d’autres régions du monde.

Dès 2009, Total acquiert des permis de recherche de gaz non-conventionnels dans la province de Neuquén en Patagonie, y compris au sein d’une aire naturelle protégée, où vivent des communautés indigènes Mapuches. L’Argentine, qui détiendrait le second potentiel mondial en termes de réserves de gaz de schiste, devient alors le nouvel eldorado des compagnies pétrolières telles que Chevron, YPF, Shell ou Apache. En 2011 débute l’exploitation du gaz de schiste dans le bassin de Vaca Muerta, au mépris des populations, dont les manifestations sont réprimées dans la violence. Aujourd’hui, plus de 400 puits sont exploités en Argentine, causant des pollutions massives et un rejet croissant des populations autochtones.

Au-delà du problème environnemental causé par l’exploitation du gaz du schiste, c’est sur l’aspect démocratique que la délégation argentine a attiré l’attention des Députés français. Les négociations ayant permis l’octroi des permis ont été faites à l’écart des populations, celles-ci n’ont jamais été consultées ni informées des risques ou dangers, et leur contestation a été balayée.

Cette audition m’a interpellée à plusieurs titres : d’abord et surtout parce que le témoignage de populations affectées confirme, si besoin était, le potentiel destructeur de l’exploitation des hydrocarbures non-conventionnels. Eaux contaminées, pollution visuelle et sonore, rejet de méthane dans l’atmosphère, entre autres : ces dommages sont des réalités.

Ensuite, cela souligne l’importance d’une cause pour laquelle je me bats : celle de la participation du public et de la prise en compte de la parole citoyenne dans les décisions publiques. En France, c’est suite à une mobilisation citoyenne d’ampleur qu’a été votée la loi d’interdiction de la fracturation hydraulique sur territoire français, avec notamment pour conséquence l’abrogation du permis dit de Montélimar, qui avait initialement été accordé à Total.

Par la suite, j’ai été rapporteure de la loi de mise en œuvre de participation du public défini à l’article 7 de la Charte de l’environnement, afin d’assurer que les citoyens restent au cœur du processus décisionnel. Depuis l’entrée en vigueur de cette loi, la délivrance de permis d’exploration est soumise à la consultation du public. La parole citoyenne est désormais au cœur de la décision politique.

Cette rencontre pose enfin la question de la responsabilité sociétale et environnementale des entreprises exploitant les mines de gaz de schiste en Argentine, dont l’entreprise française Total. A mon sens, il existe un véritable devoir de vigilance des sociétés-mères et des entreprises donneuses d’ordre, qu’il faut s’employer à faire respecter. Je suis à cet égard cosignataire d’une proposition de loi relative à ce devoir de vigilance, qui devrait être prochainement examinée à l’Assemblée nationale. C’est en portant ce combat que nous déclinerons le slogan anti-gaz de schiste qui nous est cher : ni ici, ni ailleurs.