Fin de vie : la Représentation nationale prendra aussi ses responsabilités

Ce 14 février 2014, le Conseil d’Etat a décidé de surseoir à statuer sur les requêtes d’appel tendant à l’annulation de la décision du 16 janvier 2014 par laquelle le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, saisi en référé liberté, a suspendu l’exécution de la décision du 11 janvier 2014 de mettre fin à l’alimentation et à l’hydratation artificielles de Monsieur Vincent Lambert.

Avant de statuer définitivement sur les demandes qui lui sont adressées, le Conseil d’Etat a ordonné deux mesures d’instructions.

D’une part, il ordonne la réalisation d’une nouvelle expertise sur l’état clinique de M Lambert, qui sera conduite, de manière collégiale, par trois médecins spécialisés dans les neurosciences. D’autre part, le Conseil d’Etat a décidé de consulter l’Académie nationale de médecine, le Comité consultatif d’éthique et le Conseil national  de l’Ordre des médecins et Monsieur Léonetti qui avait défendu la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des patients en fin de vie.

Ma conviction

Il n’est en aucune manière possible ni utile de commenter une décision de justice a fortiori, une décision avant dire droit dans un dossier si complexe et douloureux.

 

En tant que députée, il m’appartient cependant, comme à tous les membres de la Représentation nationale, de vérifier si cette procédure et les premières décisions rendues, le 16 janvier 2014 par le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne puis, ce jour, par le Conseil d’Etat, appellent ou non un débat parlementaire et, éventuellement, une évolution de la Loi.

 

Ma conviction est que le Parlement doit intervenir et qu’il le fera dans son rôle le plus noble pour l’intérêt général.

 

Je suis saisie par les termes de la déclaration de Monsieur Jean-Marc Sauvé, Vice-président du Conseil d’Etat : « Le Conseil d’État prend dans cette douloureuse affaire toutes ses responsabilités. Il continuera de les assumer entièrement ». La Représentation nationale doit à son tour prendre ses responsabilités.

Ma conviction est que ce drame appelle aussi un débat sur ce que peut ou ne peut pas faire la Loi, à l’endroit de problématiques aussi sensibles, intimes et complexes.

Quelle que soit la décision qui sera celle du Conseil d’Etat, au terme de cette procédure, le drame qui affecte la famille de Monsieur Vincent Lambert confirme sans doute la nécessité d’une réponse de la part du Parlement. La procédure judiciaire qui vient de se dérouler appelle une poursuite du débat sur les fins de vies, à la suite de la loi « Léonetti » du 22 avril 2005.

Les conditions, notamment procédurales, d’expression ou d’identification de la volonté de chaque personne sur son choix de fin de vie en fonction de son état de conscience et de consentement doivent, peut-être, être précisées. Les proches et les médecins confrontés à la question de l’euthanasie passive ne sauraient avoir pour seule issue aux difficultés rencontrées, que de saisir le Juge, aussi essentielle soit l’intervention de celui-ci.

 

En définitive, le débat parlementaire ne pourra avoir pour espoir de trancher une controverse entre écoles de pensée, aussi légitimes soient-elles et aussi nécessaire soit-il de les entendre, de les comprendre. Ce débat devra aller plus loin et plus loin que les clivages habituels.

 

Car l’enjeu n’est, à mon sens, pas de privilégier une conception plutôt qu’une autre de la manière de conclure son existence. L’enjeu est, conformément au droit à la vie et au droit au respect de la dignité humaine, de permettre à chacun(e) de choisir de manière éclairée les conditions de son départ. Il ne saurait, de ce point de vue, exister un modèle imposé mais des libertés individuelles respectées. Il ne saurait exister une fin de vie mais des fins de vies.

 

L’enjeu, également, est d’aider les familles et les proches, qui, d’ores et déjà frappés par le malheur, ne peuvent se voir imposer des déchirures supplémentaires.

 

C’est dans cet esprit de responsabilité mais aussi de transparence que je m’efforcerai de contribuer, dans le respect du mandat de députée qui m’a été confié, à ce débat que j’attends respectueux de toutes les opinions.