Discours de Monsieur Raoul Galataud à l’occasion de la commémoration du massacre du Hameau des Crottes

SB Hameau des Crottes (38)

Le dimanche 6 mars à Labastide-de-Virac, à l’occasion de la commémoration du massacre du Hameau des Crottes, Monsieur Raoul GALATAUD, Président d’honneur de l’association des Amis du Musée de la Résistance en Ardèche, a prononcé un discours que je souhaite partager avec vous :

 

Mesdames et Messieurs les élus et présidents,

Mesdames Messieurs,

Merci à tous de votre fidèle présence à cette cérémonie commémorative au hameau martyr des Crottes, notre petit Oradour ardéchois. Merci à M. le maire et à sa municipalité qui en assurent d’une façon exemplaire la pérennité. Saluons avec émotion la présence des descendants des familles victimes et des citoyens de la commune qui tentèrent de leur porter secours.

Monsieur le maire a rappelé les événements tragiques du 3 mars 1944 à l’issue desquels les 15 habitants de ce hameau, hommes, femmes et enfants furent odieusement assassinés au pied de ce mur, par les nazis hitlériens et hélas quelques complices ‘’français’’ supplétifs de la Wehrmacht ou miliciens. Je n’y reviendrai pas. M. le maire a également conclu par une citation qui souligne avec éloquence l’importance du devoir de mémoire et, j’ajouterai, surtout lorsqu’il concerne la nécessité impérieuse de faire en sorte qu’aucun citoyen d’aujourd’hui ou à venir ne soit ignorant des faits et mécanismes qui mirent l’humanité en péril lors de la IIe guerre mondiale, un fait historique sans comparaison, avec 60 millions de victimes civiles et militaires, plus de 5 millions d’êtres humains, opposants politique ou considérés comme appartenant à des races inférieures, exterminés en Europe dans les camps de la mort et des dizaines de milliers d’autres fusillés et entassés à coups de bottes dans des fosses communes comme en Ukraine.

C’est avec cet objectif que nous nous étions retrouvés entre anciens responsables de la Résistance en Ardèche pour créer notre Musée départemental. Inéluctablement notre génération disparaît, mais nous avons fait le nécessaire pour que le devoir de mémoire continue à être assuré. Aujourd’hui c’est en qualité de représentant de l’association des Amis du Musée de la Résistance en Ardèche que je m’adresse à vous, une association qui ne prétend pas être une organisation d’anciens combattants mais qui est représentée à l’ONAC en tant qu’association de mémoire et j’ai le plaisir d’avoir entre autre à mes côtés aujourd’hui Monsieur le sénateur honoraire Michel Teston, avec lequel nous partageons la présidence d’honneur de l’association.

Notre commission d’histoire de l’association s’implique actuellement dans une nouvelle action de mémoire en phase avec la modernité dite ‘’ Musée de la Résistance en ligne ‘’. Résistance au singulier, un mot avec un R majuscule ayant gagné ses galons de nom propre, car se rapportant à un fait historique sans comparaison, je le répète. Avec un s à la fin dont certains voudraient l’affubler, le mot n’est plus que le pluriel d’un nom commun banal aux multiples usages et bien ridicules sont les hommes politiques qui l’utilisent à tous propos, lors de joutes électoralistes au ras des pâquerettes.

Il est question actuellement de rééditer ‘’Mein Kampf’’ l’ouvrage dans lequel Hitler, dès les années 30, exposait ses théories raciales, un genre de bible distribué à des millions d’exemplaires aux jeunes allemands afin de les fanatiser en les persuadant qu’ils appartenaient à une race aryenne supérieure, qu’il leur fallait militairement conquérir l’Europe et exterminer les races dites inférieures. Dans ce livre programme les citoyens pratiquant la religion juive étaient assimilés à une race coupable de tous les maux et le peuple de France qualifié de peuple négroïde ! Il n’est pas inutile que les jeunes générations sachent que les nations démocratiques ne pouvaient pas ignorer à l’époque les intentions de Hitler et pourtant qu’elles avaient eu la faiblesse de lui laisser les mains libres. Pas inutile non plus de donner à réfléchir sur les horreurs auxquelles peuvent conduire les ‘’fanatismes’’ de toutes sortes : idéologiques, ethniques ou religieux. De douloureux événements ne cessent de nous le rappeler, même si, fort heureusement, les fanatiques d’aujourd’hui ne disposent pas d’une terrifiante machine de guerre comme l’Allemagne hitlérienne.

Voilà bien qui nous ramène à l’actualité et à comprendre que les ‘’fanatismes’’ ne seront pas supprimés avec des bombardements aériens mais ne peuvent l’être que par un libre débat philosophique et scientifique, persévérant, de longue haleine, contre l’obscurantisme. Un débat n’ayant d’ailleurs des chances d’efficacité que s’il est l’œuvre des éléments éclairés des peuples concernés et non d’intervenants étrangers ayant la prétention d’incarner le bien contre le mal, selon les termes d’un certain chef d’Etat.

Voilà qui me permet de rappeler une fois de plus que notre fierté à nous anciens Résistants est d’avoir par notre apport au nécessaire combat aux côtés des volontaires des Forces Françaises libres qui avaient rejoint le Général De Gaulle non pour fuir la guerre mais pour combattre à ses côtés, des Forces Françaises Combattantes mobilisées en Afrique et de tous les alliés, contribué, au prix des lourds sacrifices consentis, comme ceux que nous commémorons aujourd’hui, à ce que la République Française retrouve son rang de grande nation et soit présente le 8 mai 1945, pour recevoir à Berlin la capitulation sans condition des armées hitlériennes.

Oui nous sommes fiers, ayant su nous unir dans un juste combat, ceux qui croyaient au ciel et d’autres qui n’y croyaient pas, d’avoir, à l’époque, rétabli dans sa souveraineté notre République française laïque patrie des droits de l’homme, dont nous souhaitons que, fidèle aux idéaux de la Résistance, elle soit toujours un exemple, dans le domaine du progrès social et de l’action pour la Paix.

Dans notre République laïque chaque citoyen a le droit de pratiquer la religion de son choix ou d’être athéiste, mais chacun respectant l’autre. Il serait intolérable que des Pays vivant sous le régime d’une religion d’Etat prétendent avoir la légitimité de représenter cette religion et s’arrogent le droit de dicter leur comportement aux citoyens d’autres Etats au risque d’y importer des conflits religieux sanglants, stupides et sans fondement.

La voix de notre République Française a les références nécessaires pour être entendue sur le plan international, pour rappeler que c’est à l’ONU, créée dans le droit fil de la victoire du 8 mai 45, et non à une alliance militaire quelconque derrière un Etat gendarme, qu’il convient de donner les moyens de jouer son rôle de prévention des conflits ou d’y mettre fin, et de faire en sorte que les peuples puissent vivre libres, dans le respect de leurs différences, dans un monde en Paix.

Agissons afin de pouvoir être toujours fiers d’une République Française laïque, porteuse des valeurs universelles qui ont inspiré le combat de la Résistance : Liberté ! Egalité ! Fraternité !