17 Juin 2012, 4 ans plus tard

17 Juin 2012, 4 ans plus tard. 

4 ans jour pour jour après mon élection à l’Assemblée Nationale, j’ai souhaité partager avec vous ces quelques lignes.

Mme Buis Députée 16 mars 2016
Mme Buis Députée 16 mars 2016

« Félicitations »
« Tu as de la chance »
« Tu vas faire la loi »

Les félicitations,  je les ai prises.
La chance, je la mesure encore, mais je l’avais un peu provoquée.

La loi, je l’ai écrite. Je les ai écrites, devrais-je dire. Pas toutes bien sûr, pas entièrement non plus, mais j’y ai largement contribué. Et très vite, ou très tôt plus exactement.

Quelques semaines après mon installation à l’Assemblée Nationale j’étais nommée Rapporteure du projet de loi relatif à la mise en œuvre du principe de participation du public défini à l’article 7 de la Charte de l’environnement.

J’étais heureuse de pénétrer aussi rapidement au cœur du travail parlementaire. Mais j’avais fait un surpris : « Puis-je vous poser une question indiscrète? » me demandait l’administrateur qui m’accompagnait. « Comment avez-vous fait pour être Rapporteure d’un Projet de loi quelques semaines après votre arrivée ? Ajoutait-il.

Cette question m’avait laissée songeuse.

Mais, la participation du public, le dialogue environnemental était mon cheval de bataille depuis toujours et encore plus depuis la délivrance en catimini des permis d’exploration de Gaz de schiste. J’avais pris des engagements forts en période de campagne et je considérais comme une évidence de les tenir.

A l’Assemblée Nationale, rien n’est évident. C’est ainsi que j’ai, par la suite, traduit la question indiscrète. Il m’a fallu du temps pour le comprendre. Dès le début j’ai choisi de « foncer ». Pour mieux avancer, il est important parfois de ne pas trop se poser de questions, de prendre des risques même si l’on a conscience de ne pas tout savoir. Pour apprendre à nager, il faut savoir se jeter à l’eau !

Foncer, j’étais un peu obligée car mon texte était examiné en procédure accélérée. Le parcours découverte a vraiment commencé à partir de ce moment.

Jusque-là, j’avais appris à me repérer dans les murs de l’Assemblée Nationale, Rue de Grenelle et de Varenne qui concentrent un nombre important de Ministères. Mais ce n’était pas le plus compliqué.

J’avais intégré quelques codes -qui ne se partagent pas mais qui s’échangent- mais l’essentiel était à venir. Et j’ai conscience aujourd’hui d’avoir encore des choses à découvrir.

Les réunions de travail s’enchaînent: auditions, arbitrages ministériels, échanges entre parlementaires…  Les premiers rendez-vous commencent tôt le matin, les derniers s’achèvent tard, très tard le soir. C’est assez difficile de reconnaître ses interlocuteurs, ils se ressemblent tous ! : ils ont un costume noir, gris ou bleu foncé, une chemise blanche et une cravate unie. Moins souvent des femmes.

Discours juridique, policé, juridiquement policé, policé juridiquement … La courtoisie est la règle. Moi qui pensais faire de la Politique ! Très vite le débat d’idées est noyé dans un débat de mots, de concepts, de termes juridiques et les réalités de terrain semblent parfois s’éloigner.

A chacun son rôle. Il y a ceux qui ne s’expriment pas du tout. Souvent stagiaires, ils accompagnent des personnes auditionnées pour donner « du poids » à la structure. Il y a ceux qui parlent peu mais qui en savent beaucoup. Ils se contenteront de faire un retour au sein des cabinets ministériels. Il y a ceux, trop nombreux, qui vous expliquent que la sagesse est dans le statu quo avec la formule de circonstance : « Votre idée nous semble très intéressante Madame la Députée, mais un peu prématurée. Nous ne sommes pas prêts ».

Étrange moment lorsque le mutisme de certains et la « prudence » d’autres suffisent à empêcher le renouveau des idées. Étrange moment lorsqu’on s’aperçoit que, même à l’Assemblée Nationale, la parole ne se libère jamais complètement laissant place aux postures stratégiques. Le stratagème, il est bien connu : user de ses réseaux et de son pouvoir d’influence pour que rien ne change.

Etrange sentiment d’emprisonnement des idées et de privation du débat.

La première fois que je suis entrée dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale, je l’ai trouvé petit comparé à l’immensité de la fonction.

Mais la première fois que je suis entrée dans l’hémicycle, je n’étais pas seule.

Il y avait avec moi, ceux qui, quelques mois plus tard étaient accueillis par le Président de la République au Palais de l’Elysée pour mettre à l’honneur la châtaigne ardéchoise. Et tous les autres. Il y avait avec moi des personnes, des idées, des sourires, des paroles, des encouragements. Des engagements qui raisonnaient et une motivation qui ne s’est jamais affaiblie.

Le soleil ardéchois, l’odeur du genêt et celle du châtaignier m’ont toujours accompagnée.

La première fois que je suis entrée dans l’hémicycle à l’Assemblée nationale, je ne savais pas que j’allais me donner autant et que 4 ans plus tard cette envie aurait quadruplée.

La première fois que je suis entrée dans l’hémicycle à l’Assemblée nationale, je savais par qui et pour qui j’y étais.

4 ans plus tard, toute nouvelle fois est une première fois.