Départ de Christiane TAUBIRA : Un beau bilan au Ministère de la Justice

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Des garanties pour une justice indépendante, une procédure pénale plus efficace, plus de places de prison et dans de meilleures conditions, un accès plus démocratique à la justice, la lutte contre la fraude fiscale et le terrorisme…

Je vous propose de dresser le « bilan » tout à fait remarquable de Christiane TAUBIRA au Ministère de la Justice.

 

GARANTIR L’INDÉPENDANCE DE LA JUSTICE

Fin des instructions individuelles dans des affaires particulières. Dès le 19 septembre 2012, la Ministre de la Justice a adressé une circulaire aux parquets pour les informer de la fin des instructions individuelles. Pour les supprimer durablement, le Parlement a adopté le 25 juillet 2013 la loi relative aux attributions du garde des Sceaux et des parquets en matière de politique pénale et d’action publique : elle prohibe toute instruction individuelle du Ministre de la Justice aux parquets dans les dossiers individuels.

REMISE À PLAT DE LA PROCÉDURE PÉNALE

La loi relative à l’individualisation des peines et renforçant l’efficacité des sanctions pénales a été promulguée en août 2014.

Elle supprime les peines planchers, qui n’ont servi rien – le taux de récidive est passé de 8 % en 2007, avant leur introduction, à 12,1 % en 2011.

Elle limite l’aménagement des peines : toutes les peines d’emprisonnement de moins de deux ans pouvaient jusqu’ici être aménagées, seules celles de moins d’un an pour les primo délinquants et de moins de six mois pour les récidivistes peuvent encore l’être. Elle crée un nouveau dispositif de libération sous contrainte organisant un retour progressif et encadré à la liberté, pour éviter les sorties « sèches » de prison (sorties de prison sans mesure d’accompagnement). Elle crée une nouvelle peine à la disposition du juge, sans en supprimer aucune : la contrainte pénale, applicable à tous les délits punis d’une peine d’emprisonnement inférieure ou égale à 5 ans. Après 2017, cette peine sera étendue aux autres délits. La contrainte pénale soumet le condamné à un ensemble d’obligations (programmes de soin, réparation de dommages…) et d’interdictions (se rendre dans certains lieux ou rencontrer certaines personnes) et à un accompagnement soutenu qui favorisera sa réinsertion. Un bilan de l’application de cette loi est ainsi prévu au terme d’un délai de deux années.

Enfin, la loi a permis le renforcement des droits et des garanties des victimes tout au long de l’exécution des peines (information, accueil dans les tribunaux, indemnisation, soutien et accompagnement) ainsi que la création d’un nouveau dispositif d’indemnisation des victimes.

Cette réforme est accompagnée d’un renforcement des moyens nécessaire à sa bonne application. Le projet de loi de finances pour 2015 prévoit un effort sensible pour mettre en œuvre la réforme pénale : une augmentation de 25% des effectifs des Services pénitentiaires d’insertion et de probation (recrutement de 1 000 conseillers d’ici à 2017, dont 400 dès 2014, 300 en 2015 et 300 sur 2016-2017). Cela fait suite aux efforts engagés en 2013 : nomination de 30 juges d’application des peines, création de 19 substituts chargés de l’exécution des peines ; et en 2014 : création de 40 emplois de greffes et 10 emplois de juge d’application des peines. Un programme de construction de 6 500 places de prison a par ailleurs été engagé sur 2013-2015, afin de lutter contre la surpopulation carcérale. 1 150 places brutes ont déjà été livrées en 2013 et 1 170 en 2014. En complément, un deuxième programme de 3200 places a été lancé sur le triennal 2015-2017. Au total, le financement de 9 700 places de prison nettes (déduction faite des fermetures des établissements vétustes) aura été engagé sous l’impulsion du gouvernement d’ici la fin du quinquennat.

Afin de garantir l’effectivité des droits de la défense et la protection des droits des victimes, la loi du 27 mai 2014 transpose des directives européennes et renforce le contradictoire à tous les stades de la procédure pénale notamment en consacrant un véritable statut du suspect et renforçant les droits de la personne gardée à vue.

EXÉCUTION DE TOUTES LES PEINES PRONONCÉES

La bonne exécution des peines est un élément clé pour la confiance des Français en leur système judiciaire. La réforme pénale en fait un objectif central, avec des peines individualisées, et adaptées permettant de sanctionner plus efficacement et ainsi prévenir la récidive. Des moyens sont par ailleurs mobilisés pour concourir à cette bonne exécution des peines, notamment par le recrutement de magistrats et la construction de 9 700 places de prisons supplémentaires.

AMÉLIORATION DES CONDITIONS CARCÉRALES POUR DES PRISONS « CONFORMES À NOS PRINCIPES DE DIGNITÉ »

Deux circulaires ont été publiées, l’une en octobre 2012 relative à l’obtention et au renouvellement de la carte nationale d’identité pour les détenus, et l’autre en mai 2013 relative à la lutte contre la pauvreté en détention. Un plan de sécurisation de 33 millions d’euros a par ailleurs permis d’engager la mise en œuvre de l’interdiction des fouilles systématiques. Le gouvernement poursuit un programme immobilier d’urgence (2015-2017) permettant l’amélioration des conditions de détention : fermeture d’établissements vétustes (2 500 places fermées) ; lancement de projets de rénovation (Fleury-Mérogis, La Santé, les Baumettes, etc.) ; ouverture de nouveaux établissements, dont 3 seront mis en service cette année (Vendin-le-Vieil, Valence, Beauvais) ; 6 fois plus d’établissements équipés en Unité de Vie Familiale et en parloirs ; ouverture de 8 Unités hospitalières sécurisées interrégionales et de 4 Unités hospitalières spécialement aménagées.

Enfin, 30 aumôniers musulmans ont été recrutés en 2013 et 2014 et 60 le seront en 2015 (182 au total). Les conditions de leur formation et de leur recrutement sont essentielles pour permettre l’exercice digne du culte musulman et lutter contre l’influence souvent néfaste d’imams auto-proclamés.

CENTRES ÉDUCATIFS FERMÉS POUR MINEURS

Une première mission d’évaluation des modes de prises en charge des mineurs délinquants initiée par la ministre de la Justice en 2012 recommande de porter à 58 le nombre de centres éducatifs fermés. 7 nouveaux centres ont d’ores et déjà été ouverts, portant à 50 le nombre actuels de centres éducatifs fermés. Plus largement, il peut être fait état en 2014 du financement de 2 nouveaux centres éducatifs fermés ; de la création de 78 emplois pour l’ouverture de ces établissements ; de l’ouverture de 2 nouveaux établissements éducatifs rénovés en Guyane et en Martinique. En 2015, 56 emplois seront créés pour le renfort des actions éducatives menées en milieu ouvert et dans les centres éducatifs fermés, un nouveau centre sera créé et les rénovations de 25 établissements seront engagées.

FACILITER L’ACCÈS À LA JUSTICE DE PROXIMITÉ POUR LES LITIGES PORTANT SUR DES ASPECTS ESSENTIELS DE LA VIE QUOTIDIENNE DES FRANÇAIS

Le timbre de 35 euros imposé aux justiciables pour contribuer au financement de l’aide juridique a été supprimé depuis le 1er janvier 2014 et l’aide juridictionnelle augmente de 10% en 2015 (379 M€) avec la création d’une ressource nouvelle de 43 M€ affectée au Conseil nationale des barreaux. Le budget de l’aide aux victimes a été augmenté de 65% depuis 2012. Trois tribunaux de grande instance (TGI) ont été réouverts et des chambres détachées de TGI ont été créées pour pallier les difficultés nées de la refonte de la carte judiciaire. Des chambres détachées des TGI se sont également ouvertes en 2014. S’est ajouté le 1er janvier 2015 la chambre détachée du TGI de Rodez à Millau. Plus de 100 bureaux d’aide aux victimes (BAV) ont été ouverts dans les TGI, portant le nombre à 154 fin 2014. Leur généralisation sera complète cette année, soit 167 bureaux au total. Le Conseil national de l’aide aux victimes, créé en 1999, est à nouveau activement associé aux travaux du ministère de la Justice. La communication électronique entre tribunaux et usagers a été engagée et plusieurs dispositions pour accompagner les justiciables dans les étapes importantes de leur vie (tutelle, régime matrimonial, etc.) sont prévues par la loi relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures, promulguée en février 2015. Le projet de loi « Justice du 21ème siècle » en préparation renforcera encore la proximité de ce service public. Actuellement un service d’accueil unique du justiciable (SAUJ) est expérimenté depuis l’automne 2014 dans six juridictions (Bobigny, Brest, Dunkerque, Privas, et Saint-Denis de la Réunion). Par ailleurs un portail internet, intitulé « Portalis » sera mis en place cette année. Il permettra de saisir la justice et de suivre l’évolution de la procédure par internet. Ce projet de loi permettra de mieux évaluer les besoins de justice au niveau local en association avec la société civile et enfin de créer des conseils de juridictions pour plus de transversalité dans l’accès aux droits.

RENFORCEMENT DES MOYENS POUR LUTTER CONTRE LA FRAUDE FISCALE

Un renforcement sans précédent de l’arsenal législatif a été conduit avec plus de 70 nouvelles mesures législatives de lutte contre la fraude fiscale adoptées depuis 2012.

Dès 2012, plus de 20 mesures fortes ont été prises. Bien que très techniques, on peut citer la possibilité accrue accordée aux administrations d’accéder à des données informatiques stockées à distance, l’élargissement de la procédure judiciaire d’enquête fiscale ou la taxation à 60 % des avoirs non déclarés à l’étranger dont le contribuable ne peut justifier la provenance.

Chaque projet de loi de finances, de financement de la sécurité sociale, ainsi que deux projets de loi spécifiques sont depuis venus apporter leur pierre à l’édifice.

En parallèle d’un renforcement des moyens et des effectifs, un parquet financier a été installé le 1er février 2013, pour conduire et coordonner, au niveau national, toutes les enquêtes relatives aux infractions les plus graves. Les techniques spéciales d’investigation telles que la surveillance, les écoutes téléphoniques, les sonorisations et fixations d’images, ou la captation de données informatiques peuvent être utilisées, sous le contrôle du juge, pour la poursuite des délits de fraude fiscale les plus graves. L’administration peut désormais utiliser les informations régulièrement portées à sa connaissance par une autorité publique, même lorsque la personne qui les a transmises à cette autorité publique les a obtenues irrégulièrement.

La fraude fiscale en bande organisée est désormais plus lourdement sanctionnée.

De nombreuses dispositions ont aussi été prises pour lutter contre les principales techniques utilisées par les entreprises pour minorer l’impôt, et faire de l’optimisation fiscale abusive : au-delà de la réduction de la niche « Copé » et de la limitation de la déductibilité des charges financières figurent notamment la lutte contre les endettements artificiels et contre les opérations financières organisant le transfert de bénéfices à l’étranger. Les moyens de contrôle des prix de transfert et de lutte contre la fraude à la TVA ont également été renforcés.

A l’échelle européenne et internationale, la France est aux avant-postes de la lutte contre la fraude. En octobre 2014, 52 Etats ont signé un accord multilatéral établi par l’OCDE visant à mettre en place entre eux un échange automatique d’informations financières à des fins fiscales dès 2017. Cette signature a marqué « une étape décisive et irréversible dans la lutte contre la fraude fiscale », « un changement d’époque » marquant « la fin du secret bancaire en Europe, et même au-delà », selon les propres mots du ministre des Finances Michel Sapin.  En décembre 2014, lors du G20 en Australie, les Etats ont pris d’importantes dispositions contre la fraude, l’évasion et l’optimisation fiscale, pour élargir l’échange automatique d’informations – et porter à plus de 90 le nombre d’Etats et territoires d’ici 2018 -, pour lutter contre les régimes fiscaux dommageables (par exemple en matière de brevets= et renforcer la transparence en matière de rescrits fiscaux. Suite à la lettre adressée à la Commission par les 3 ministres des finances français, allemand et italien et aux conclusions du Conseil européen de décembre, l’Union européenne a décidé d’agir spécifiquement contre l’optimisation fiscale en Europe. Une directive sur la transparence a été présentée, un plan d’action comprenant un volet législatif est attendu d’ici juin concernant la concurrence fiscale. (cf. engagement n° 7 sur les paradis fiscaux).

Les résultats sont déjà là. Ce renforcement des moyens de contrôle et de la coopération internationale conduisent de nombreux contribuables à déclarer spontanément les avoirs antérieurement dissimulés à l’étranger. Plus de 35 000 dossiers ayant déjà rapporté près de 2 Md € en 2014, ont été reçus par le Service de traitement des déclarations rectificatives depuis son ouverture. Les recettes ainsi acquises grâce à la détermination du Gouvernement à lutter contre la fraude fiscale ont permis de financer la réduction de l’impôt sur le revenu de plus de 4 millions de ménages modestes en 2014.

RENFORCEMENT DES MOYENS POUR LUTTER CONTRE LE TERRORISME

Après les attentats de janvier, 2680 emplois ont été programmés en 3 ans pour la lutte contre le terrorisme, dont 950 au ministère de la Justice.

Après le 13 novembre, 8500 emplois supplémentaires ont été programmés dont 2 500 au ministère de la justice.

La répression de l’apologie du terrorisme et de la provocation à des actes de terrorisme a été renforcée, avec une peine pouvant aller jusqu’à 7 ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende. Une circulaire a été adressée en ce sens aux procureurs de la République, demandant une réponse pénale systématique, adaptée et individualisée à chacun de ces actes, y compris quand ils sont accomplis en détention.

Une première loi anti-terroriste dès 2012, pour mieux détecter les parcours de radicalisation et de basculement vers le terrorisme, a notamment permis de modifier le code pénal pour que la loi française s’applique aux actes de terrorisme commis à l’étranger par des Français.

Une seconde loi anti-terroriste en novembre 2014 a notamment engagé des mesures pour prendre en compte les nouveaux modes opératoires des terroristes : poursuites judiciaires possibles contre les terroristes agissant seuls ; pénalisation des actes préparatoires aux crimes terroristes ; et doter la justice et les services de police de moyens d’investigation adaptés à la menace et à ses évolutions.

Le projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale, a été présenté en Conseil des ministres. Il participe au renforcement de la lutte antiterroriste en donnant aux juges et aux procureurs de nouveaux moyens : techniques d’enquête similaires à celles mises en œuvre par les services de renseignement ; perquisitions de nuit en matière de terrorisme ; garanties pour les témoins menacés…